La kinésithérapie, une aide précieuse pour les personnes touchées par le « covid long »

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Le 19 novembre dernier, la Haute Autorité de Santé (HAS) a mis à jour ses recommandations concernant l’accompagnement des personnes touchées par le «covid long ». Elle y précise notamment le rôle important de la prise en charge en kinésithérapie. C’est l’occasion, pour nous, de faire le point.

« Covid long » , de quoi parle-t-on ?

Depuis le début de l’épidémie, la persistance d’un ou plusieurs symptômes après une infection initiale au covid a été observée chez plus de 20 % des patients après 5 semaines et chez plus de 10 % des patients après 3 mois. Les symptômes prolongés de la Covid-19 peuvent se présenter sous des formes très diverses et toucher aussi bien des personnes qui ont eu une forme grave et ont été hospitalisées que d’autres qui ont eu une forme relativement bénigne de la maladie.

Le terme « Covid-long » a été créé et utilisé par les patients puis repris dans la littérature pour qualifier un phénomène correspondant à persistance de symptômes à la suite d’une infection au Covid-19. C’est la raison pour laquelle la HAS parle davantage de « symptômes prolongés ». L’OMS, pour sa part, a proposé une définition de « l’état post-covid » qui va être amenée à évoluer. Elle décrit cet état notamment par la présence de symptômes au-delà de 3 mois après l’épisode aigu.

3 critères doivent être réunis pour parler de « Covid long » :

  • Avoir été malade du Covid.
    • soit confirmé par au moins un critère parmi : test PCR positif, test antigénique positif , Sérologie positive, anosmie (perte d’odorat)/agueusie(perte de goût) prolongée de survenue brutale, scanner thoracique typique (pneumonie bilatérale en verre dépoli…),
    • soit probable par l’association d’au moins trois critères, de survenue brutale, dans un contexte épidémique, parmi : fièvre, céphalée, fatigue, myalgie, dyspnée, toux, douleurs thoraciques, diarrhée, odynophagie. Un test sérologique positif peut aider à ce diagnostic.
  • Présenter au moins un des symptômes initiaux, au-delà de 4 semaines suivant le début de la phase aiguë de la maladie
  • Ces symptômes initiaux et prolongés ne sont pas expliqués par un autre diagnostic sans lien connu avec le Covid-19.

Les symptômes répertoriés à ce jour sont très variés et doivent être bien évidemment distingués des complications du Covid-19. Ils sont d’ordre divers :

  • Fatigue, fatigabilité à l’effort et hypotension orthostatique
  • Pulmonaires : Syndrome d’hyperventilation, hyperréactivité bronchique)
  • Cardiovasculaires : Péricardite, myocardite, tachycardie posturale)
  • Neurologiques : maux de tête, difficulté de concentration, troubles de la mémoire, douleurs neuropathiques, troubles de l’équilibre
  • Psychologiques : trouble anxieux, dépression, stress post-traumatique
  • Digestifs : gastrite, œsophagite, colopathie…
  • Dermatologiques : pseudo-engelures, éruption cutanées, troubles vasomoteurs
  • ORL : modification ou perte du goût et/ou de l’odorat, acouphènes, vertiges
  • Ophtalmiques : fatigue à la lecture, sécheresse oculaire, perte d’acuité visuelle
  • Douleurs musculaires
  • Désadaptation à l’effort

Même si, à ce jour, il demeure un certain nombre d’inconnues sur ces symptômes prolongés, il existe différentes données qui font l’objet d’un consensus. Elles invitent à la patience et à une prise en charge adaptée, pluridisciplinaires et centrée sur le patient :

  • Le temps de récupération, de retour à un état de santé préexistant, peut-être plus ou moins long en fonction des patients comme lors d’autres infections virales (ex. : mononucléose infectieuse, hépatites virales, autres coronavirus (SARS, MERS)).
  • Une part importante des patients semble s’améliorer de façon progressive, en général en plusieurs mois, avec une prise en charge globale, pouvant inclure des traitements symptomatiques, du repos et une réadaptation respiratoire et/ou un ré entrainement progressif à l’effort (en respectant les capacités des patients).
  • Une bonne hygiène de vie est essentielle : alimentation équilibrée, relaxation, respect du rythme veille-sommeil, limitation des excitants, limitation ou mieux arrêt de l’alcool, du tabac et des autres substances toxiques
  • La reprise d’une activité physique quotidienne doit être favorisée et adaptée aux capacités du patient et aux seuils d’effort déclenchant les symptômes. Cette reprise d’activité est toutefois contre-indiquée en cas de pathologie cardiaque.

 

Le rôle du kinésithérapeute dans la prise en charge du « covid long »

Au regard de ces différents éléments, on devine l’importance de la kinésithérapie pour les personnes touchées par un « covid long » afin de les aider à retrouver une vie « normale ».
Deux aspects de la réadaptation prédominent : le réentrainement à l’effort et la rééducation du syndrome d’hyperventilation.

Le réentrainement à l’effort

De nombreux patients présentant des symptômes prolongés de la Covid-19 souffrent un déconditionnement physique et devraient bénéficier d’une réhabilitation respiratoire qui intègre le réentrainement à l’effort. Celui-ci doit être mené de façon progressive et adapté aux possibilités de chaque patient.
Ce réentrainement a également un impact positif sur la fatigue ainsi que sur les troubles anxieux et/ou dépressifs.
Dans un premier temps, le kinésithérapeute effectue différents bilans afin de proposer à la personne un programme adapté :

  • Évaluation des capacités aérobie
  • Évaluation des capacités anaérobies
  • Évaluation des douleurs
  • Évaluation de la fatigue, de la fatigabilité
  • Évaluations fonctionnelles
  • Évaluations des compétences des patients, de leurs motivations
  • Évaluation de la qualité de vie
  • Évaluation des capacités de proprioception et équilibre
  • Évaluation de la motricité globale en lien avec d’éventuels troubles neurologiques
  • Évaluations articulaires (déficits d’amplitude, douleurs au mouvement)
  • Évaluation respiratoire
  • Recherche de trouble de déglutition, évaluation de la déglutition (patient post réanimation et/ou 
âgé et/ou avec antécédent de lésion neurologique centrale)
  • Identification d’une éventuelle perte de poids en lien avec anosmie, agueusie et/ou trouble de déglutition.

Puis, les séances comprendront a minima :

  • Un réentrainement aérobie (vélo, tapis de marche…)
  • Un réentrainement de la force des muscles des membres et du tronc (banc de musculation à 
charges guidées, poids et haltères, élastiques…)
  • Et, en fonction des résultats du bilan initial et des bilans intermédiaires :

Un réentrainement des muscles respiratoires (valves résistées en pression)

  • Un réentrainement de l’équilibre
  • Un retour au sport antérieur avec réintégration du geste sportif

Quel que soit le programme définit, le kinésithérapeute sera extrêmement attentif à la fatigue et aux douleurs post-effort et adaptera les séances en fonction.

La rééducation du syndrome d’hyperventilation

Le syndrome d’hyperventilisation se manifeste par :

  • une dyspnée (gêne respiratoire),
  • une anxiété,
  • une toux,
  • un mode ventilatoire (généralement) thoracique haut avec une surutilisation des inspirateurs accessoires,
  • une respiration bucco- buccale superficielle,
  • la présence en excès de soupirs, bâillements, raclements de gorge, inspirations trop profondes.

D’autres symptômes tels que céphalées, confusions, vertiges, lipothymies, palpitations, arythmies, ballonnements, nausées, épigastralgies, paresthésies, tremblements, crampes ou douleurs musculaires sont parfois ressentis ou rapportés.

La rééducation de ce syndrome en kinésithérapie est basée sur une observation méthodique de la respiration (fréquemment thoracique haute) et une attention bienveillante des affects.
Elle fait appel à la conscientisation de la respiration et repose sur le contrôle ventilatoire au cours de diverses situations (au repos, à l’effort en résistance et en endurance) vécues de manière positive. Elle comprend des exercices respiratoires à différents volumes, débits et pressions, des apnées, avec guidage par le kinésithérapeute et une sensibilisation à la ventilation abdomino-diaphragmatique, ainsi qu’éventuellement thoracique haute et basse en fonction de la clinique. Les techniques de relaxation pourraient avoir un intérêt.
La pratique des exercices respiratoires à domicile est souvent recommandée ainsi qu’une transposition de la gestuelle respiratoire au quotidien. 
L’efficacité de la prise en charge s’observe par l’amélioration des symptômes et de la qualité de vie des patients : baisse de la dyspnée, de la fréquence respiratoire, reprise de l’activité physique, amélioration de l’hypocapnie (diminution de la concentration de gaz carbonique dans le sang)…

Dans tous les cas, le kinésithérapeute a également un rôle à jouer dans l’éducation thérapeutique du patient. Il l’accompagnera dans l’apprentissage de la gestion de son effort et dans l’intégration d’une hygiène de vie adaptée. Enfin, dès lors que les séances sont fréquentes, le kinésithérapeute pourra repérer d’éventuels drapeaux rouges qui devront amener le patient à consulter un médecin.

 

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